En lisant ces paroles, peut-être avez-vous pensé que votre curé anticipe le Carême puisque ces paroles « Convertissez-vous et croyez à l’Evangile » en sont comme le refrain annuel !
Je voudrais plutôt qu’elles résonnent comme un refrain quotidien : pour chaque jour et pour tous les jours de notre vie chrétienne ! Je voudrais donc rappeler que l’appel à la conversion ne concerne pas seulement quelques domaines de notre vie religieuse personnelle mais qu’il s’étend à tous les domaines de notre vie : notre vie familiale, notre vie professionnelle, notre vie sociale et même le rapport que nous avons à notre environnement.
En février, la paroissea vécu deux temps de réflexion sur le sujet de l’écologie intégrale et de l’appel à la conversion à l’Evangile :
- Mardi 11 février à 20h30 à la Nativité, 5, rue Capty, à Orange dans le cadre des mardis de la paroisse, Gonzague Le Bigot nous a parlé de l’écologie intégrale, chemin de vie chrétienne et de saintetéà partir de l’encyclique du pape François ‘Laudato Si’. Dans l’entreprise (centrale d’achat) dans laquelle Gonzague Le Bigot travaille, il suscite de la part de ses collaborateurs et fournisseurs un engagement concret et mesurable pour l’écologie intégrale.
- Jeudi 13 février à 19h30 dans la grande salle du presbytère, 178, Bd Daladier à Orange, il y a eu un repas partagé avec ce que chacun aura apporté. Les personnes qui s’intéressent au thème de l’écologie intégrale échangeront sur la manière dont elles ont reçu l’encyclique Laudato Si et sur les actions qu’elles ont déjà mises en place chez elles, sur l’action qu’elles souhaitent développer dans la paroisse et au-delà. Peut-être commencerons-nous à tisser un réseau d’action commune !
Ces deux propositions ne tombent pas de la lune ! Elles ne sont pas un effet de mode. Elles sont en pleine cohérence avec l’appel de Jésus, toujours actuel : "Convertissez-vous et croyez à l’Evangile." Pour en comprendre la pertinence, rappelons-nous que :
- Au XIXe et au XXe siècles, les papes Léon XIII, Pie XI puis Jean Paul II ont enseigné l’Eglise en matière de doctrine sociale. L’encyclique Laborem exercens parle de L’EVANGILE DU TRAVAIL et chaque génération est appelée à vivre la conversion dans ces domaines de l’emploi, de la relation aux biens matériels...
- Au XXe siècle, les papes Pie XII, Paul VI et Jean-Paul II ont enseigné l’Eglise sur la valeur et l’inviolabilité de la vie humaine. En nous annonçant L’EVANGILE DE LA VIE, ils nous invitaient à la conversion, au respect de la vie, depuis sa conception jusqu’à son terme naturel. Cette conversion est toujours d’actualité.
- Dès 1979, Saint Jean-Paul II invitait les catholiques à une conversion écologique globale sauvegardant les conditions morales d’une écologie humaine authentique. Benoit XVI a souligné que le gaspillage des ressources de la Création commence là où nous ne reconnaissons plus aucune instance au-dessus de nous, mais ne voyons plus que nous-mêmes.
- En 2015, le pape François nous a donné la lettre encyclique LAUDATO SI’ sur la sauvegarde de la maison commune. Son but est de nous inviter à recevoir L’EVANGILE DE LA CREATION et à prendre conscience que nous avons besoin d’une conversion qui nous unisse tous, parce que le défi environnemental que nous vivons, et ses racines humaines, nous concernent et nous touchent tous. Laudato Si n°14
S’il est vrai que « les déserts extérieurs se multiplient dans notre monde, parce que les déserts intérieurs sont devenus très grands », la crise écologique est un appel à une profonde conversion intérieure. Mais nous devons aussi reconnaître que certains chrétiens, engagés et qui prient, ont l’habitude de se moquer des préoccupations pour l’environnement, avec l’excuse du réalisme et du pragmatisme. D’autres sont passifs, ils ne se décident pas à changer leurs habitudes et ils deviennent incohérents. Ils ont donc besoin d’une conversion écologique, qui implique de laisser jaillir toutes les conséquences de leur rencontre avec Jésus-Christ sur les relations avec le monde qui les entoure. Vivre la vocation de protecteurs de l’œuvre de Dieu est une part essentielle d’une existence vertueuse ; cela n’est pas quelque chose d’optionnel ni un aspect secondaire dans l’expérience chrétienne. Laudato Si n° 217
En évoquant la sauvegarde de la maison commune, l’Eglise est fidèle à sa mission qui est d’annoncer et de rappeler que le destin de toute la création passe par le mystère du Christ, qui est présent depuis l’origine de toutes choses : « Tout est créé par lui et pour lui » (Col 1, 16). Le Prologue de l’Évangile de Jean (1, 1-18) montre l’activité créatrice du Christ comme Parole divine (Logos). Mais ce prologue surprend en affirmant que cette Parole « s’est faite chair » (Jn 1, 14). Une Personne de la Trinité s’est insérée dans le cosmos créé, en y liant son sort jusqu’à la croix. Dès le commencement du monde, mais de manière particulière depuis l’Incarnation, le mystère du Christ opère secrètement dans l’ensemble de la réalité naturelle, sans pour autant en affecter l’autonomie. » Laudato Si n°99
Le Nouveau Testament ne nous parle pas seulement de Jésus terrestre et de sa relation si concrète et aimable avec le monde. Il le montre aussi comme ressuscité et glorieux, présent dans toute la création par sa Seigneurie universelle : « Dieu s’est plu à faire habiter en lui toute plénitude et par lui à réconcilier tous les êtres pour lui, aussi bien sur la terre que dans les cieux, en faisant la paix par le sang de sa croix » (Col 1, 19-20). Cela nous projette à la fin des temps, quand le Fils remettra toutes choses au Père et que « Dieu sera tout en tous » (1Co 15, 28). De cette manière, les créatures de ce monde ne se présentent plus à nous comme une réalité purement naturelle, parce que le Ressuscité les enveloppe mystérieusement et les oriente vers un destin de plénitude. Même les fleurs des champs et les oiseaux qu’émerveillé il a contemplés de ses yeux humains, sont maintenant remplis de sa présence lumineuse. Laudato Si n°100
Dans la modernité, il y a eu une grande démesure anthropocentrique qui, sous d’autres formes, continue aujourd’hui à nuire à toute référence commune et à toute tentative pour renforcer les liens sociaux. C’est pourquoi, le moment est venu de prêter de nouveau attention à la réalité avec les limites qu’elle impose, et qui offrent à leur tour la possibilité d’un développement humain et social plus sain et plus fécond. Une présentation inadéquate de l’anthropologie chrétienne a pu conduire à soutenir une conception erronée de la relation entre l’être humain et le monde. Un rêve prométhéen de domination sur le monde s’est souvent transmis, qui a donné l’impression que la sauvegarde de la nature est pour les faibles. La façon correcte d’interpréter le concept d’être humain comme “seigneur” de l’univers est plutôt celle de le considérer comme administrateur responsable. Laudato Si n°116
Le manque de préoccupation pour mesurer les préjudices causés à la nature et l’impact environnemental des décisions est seulement le reflet le plus visible d’un désintérêt pour reconnaître le message que la nature porte inscrit dans ses structures mêmes. Quand on ne reconnaît pas, dans la réalité même, la valeur d’un pauvre, d’un embryon humain, d’une personne vivant une situation de handicap – pour prendre seulement quelques exemples – on écoutera difficilement les cris de la nature elle-même. Tout est lié. Si l’être humain se déclare autonome par rapport à la réalité et qu’il se pose en dominateur absolu, la base même de son existence s’écroule, parce qu’« au lieu de remplir son rôle de collaborateur de Dieu dans l’œuvre de la création, l’homme se substitue à Dieu et ainsi finit par provoquer la révolte de la nature ». Laudato Si n°117
La conversion écologique n’est pas un affaire individuelle. Elle est nécessairement une conversion communautaire. En effet, « cette conversion suppose diverses attitudes qui se conjuguent pour promouvoir une protection généreuse et pleine de tendresse. En premier lieu, elle implique gratitude et gratuité, c’est-à-dire une reconnaissance du monde comme don reçu de l’amour du Père, ce qui a pour conséquence des attitudes gratuites de renoncement et des attitudes généreuses même si personne ne les voit ou ne les reconnaît : « Que ta main gauche ignore ce que fait ta main droite [...] et ton Père qui voit dans le secret, te le rendra » (Mt 6, 3-4). Cette conversion implique aussi la conscience amoureuse de ne pas être déconnecté des autres créatures, de former avec les autres êtres de l’univers une belle communion universelle. Pour le croyant, le monde ne se contemple pas de l’extérieur mais de l’intérieur, en reconnaissant les liens par lesquels le Père nous a unis à tous les êtres. En outre, en faisant croître les capacités spécifiques que Dieu lui a données, la conversion écologique conduit le croyant à développer sa créativité et son enthousiasme, pour affronter les drames du monde en s’offrant à Dieu « comme un sacrifice vivant, saint et agréable » (Bm 12, 1). Il ne comprend pas sa supériorité comme motif de gloire personnelle ou de domination irresponsable, mais comme une capacité différente, lui imposant à son tour une grave responsabilité qui naît de sa foi. Laudato Si n°220