Pour l’amour de Dieu !

23 octobre 2020

Pour l’amour de Dieu !

Il n’est pas si loin le temps où la chanson demandait à l’ami Pierrot de prêter sa plume à son voisin ‘pour l’amour de Dieu’. Tous, nous le savons, plus ou moins clairement : l’amour de Dieu et du prochain ne font qu’un. L’Evangile de ce dimanche nous le rappelle pour mieux le comprendre.

Remarquons tout d’abord la tension dans laquelle se situe cette page d’Evangile. Jésus est à Jérusalem. Depuis qu’au jour des Rameaux, il y est entré triomphalement, Il enseigne chaque jour dans le Temple ; beaucoup viennent à lui et le reconnaissent comme le Messie. Mais ses ennemis en sont jaloux ; ils se regroupent et se relaient pour mettre son enseignement à l’épreuve. Si l’on pouvait le prendre en défaut, il serait facile de le condamner.

Jésus, dans sa sagesse, a déjà fait taire plusieurs contradicteurs. Dans l’évangile entendu dimanche dernier, quelques pharisiens avaient cherché à le piéger à propos de l’impôt dû à César. Aujourd’hui, les Pharisiens insistent, eux qui faisaient profession d’être les exacts observateurs de la Loi : pour chaque commandement, ils multipliaient les prescriptions et les pratiques extérieures. Mais en compliquant tout, ils corrompaient la Loi de Dieu.

Ils avaient remarqué que Jésus ne se souciait guère de leurs pratiques ; il leur semblait surtout que Jésus donnait plus d’importance à l’amour du prochain qu’à l’amour de Dieu. Il n’hésitait pas à manger avec des pécheurs, à parler avec des femmes de mauvaise vie comme la Samaritaine, à s’inviter chez des voleurs comme Zachée…

On pouvait donc penser que son enseignement faisait de l’amour du prochain le grand, c’est à dire le plus grand commandement. Encore fallait-il, pour pouvoir le condamner, le lui faire dire ? D’où la question : Maître, quel est le grand commandement de la Loi ? En se référant clairement au 1er commandement du Décalogue, Jésus déjoue le piège : Tu aimeras le Seigneur ton Dieu de tout cœur, de toute ton âme et de tout ton esprit.

Et puisqu’il y a un 2e commandement, Jésus le redit fidèlement : Tu aimeras ton prochain comme toi-même. Jusque-là, rien de nouveau : on a bien e résumé de la loi et des prophètes. Ce qu’il y a de nouveau dans l’enseignement du Christ, c’est de montrer le lien qu’il y a entre ces deux commandements. Ils sont distincts et semblables.

Il y a bien un premier et un second parce qu’ils sont distincts : aimer Dieu, ce n’est pas aimer la même personne que son prochain. Veillons à ne pas confondre Dieu et l’homme !!! Dieu doit être le premier servi. En effet, Il est parfait, aimable, c’est-à-dire tellement bon que l’on ne peut que l’aimer. Nous aimons Dieu parce qu’Il est Dieu !

Pour sa part, notre prochain, nous le savons, n’est pas toujours aussi aimable ! Spontanément, nous aimons ceux qui nous sont sympathiques et nous évitons ceux qui nous sont antipathiques ! Pourtant, Dieu nous demande d’aimer tous nos frères ! Car aimer Dieu ne peut pas aller sans l’amour de son prochain.

Distincts, ces deux commandements sont aussi semblables. Puisque l’homme est créé à l’image et à la ressemblance de Dieu, c’est Dieu que nous aimons dans l’homme ; cela est encore plus manifeste quand l’homme est devenu par le baptême, l’icône de la Trinité.

Jésus nous présente donc ces deux articles de la loi comme on présente des jumeaux : ils sont portés ensemble et ils ‘viennent’ ensemble… et de plus, ils se ressemblent !! Jésus nous met ainsi face à notre responsabilité. Il y a bien deux commandements. Ils sont bien distincts. Sans les séparer, tenons ensemble l’amour de Dieu et l’amour du prochain, au risque d’avoir une vie incohérente : Celui qui dit aimer Dieu qu’il ne voit pas sans aimer son frère qu’il voit est un menteur. (Cf. 1 Jn 4, 20-21)

Aimer les hommes, c’est difficile, surtout quand il s’agit, comme le Christ nous le demande, d’aimer même nos ennemis (cf. Mt 5, 44) et d’aller jusqu’à leur pardonner. Par nos propres forces, l’amour du prochain est difficile, il est presque impossible. Et pourtant, nous le savons, notre bonheur dépend beaucoup de cet amour que nous donnons.

Pour être vrai, notre amour du prochain ne peut être que la conséquence de l’amour de Dieu : la charité vient de Dieu ; parce qu’Il nous aime, Dieu nous rend capables de L’aimer et d’aimer notre prochain.

Demandons donc au Seigneur d’augmenter en nous son amour pour que nous puissions nous réjouir en ces deux jumeaux que sont l’amour de Dieu et l’amour du prochain. Ils sont tellement proches que celui qui voit en l’homme un membre du Christ et l’aime comme un fils du Père honore aussi, de cette manière, le Père. Et celui qui aime le Père n’hésitera pas, à la suite du Christ, à se mettre au service de son frère en qui il voit l’image du Père.

Oui aimer Dieu en son prochain et son prochain en Dieu, c’est une seule et même chose, car l’amour unifie toutes choses.

Père Michel BERGER, curé